Il ne s’agit pas ici d’écrire le texte, bien entendu, mais de penser comment, par quels procédés, l’histoire s’écrira au plateau. Cela suppose de réfléchir à la scénographie (étymologiquement « écriture de la scène » : c’est donc plus qu’un simple décor, mais quelque chose qui permet de raconter une histoire), aux costumes, aux accessoires, aux lumières, aux passages de relais d’un·e élève à l’autre pour un même rôle, quelles scènes jouer si l’on ne joue pas tout, etc.
En ce qui concerne la scénographie, les décors, les costumes et accessoires, les lumières et autres bandes sonores, il est important d’utiliser le travail effectué par les élèves au début de l’étude. Cela permet de les impliquer véritablement dans ce projet qui sera le leur. Le choix des divers éléments peut d’ailleurs se faire lors de discussions en classe.
La construction du spectacle – comment passer d’une scène à une autre, d’un·e élève à un·e autre – n’a cependant pas encore été abordée et demande de s’y arrêter. Pour rappel, Daniel Keene insiste sur le fait que la mise en scène de sa pièce doit contenir selon lui le moins d’éléments possible. Chaque élément devient donc symbolique et suffit à évoquer un personnage, un lieu, un moment, etc. Les éléments de costumes ou d’accessoires choisis par les élèves, s’ils sont suffisamment clairs et identifiables, seront des signes de relais très efficaces : il suffit qu’un·e élève porte ce costume ou cet accessoire pour que le personnage qu’il ou elle joue soit clairement identifié. On peut imaginer pour le spectacle, que sur le plateau est créé un autre espace scénique (une grande estrade, ou un grand rectangle délimité au sol par du gaffeur, par exemple). C’est dans cet espace que se dérouleront les scènes jouées par deux élèves (Pascal et Julien), voire plus dans le cas d’un travail sur le chœur comme pour la lecture de la scène « JUIN ». Les autres élèves se tiennent sur le plateau, au bord de la scène où jouent les groupes de deux élèves. (Voir La présence de tous dans l’espace scénique). Les élèves sur le bord de la scène peuvent s’occuper des changements de décor (tables, chaises, etc.) ainsi que des didascalies. Les didascalies sont un guide pour l’action et donnent parfois des consignes de mouvements et d’expressions aux acteur·rices. Toutefois, celles de Keene sont ici particulièrement présentes et littéraires et donnent des informations précieuses, notamment en début et fin de scène sur le cadre spatio-temporel. Lire ces didascalies au public peut être un moyen de lui donner des clefs de compréhension de la pièce et de la scénographie (en décrivant un lieu à l’oral tout en installant sur scène un élément qui le représente), et montrer aux spectateur·rices que tout vient du texte. Par ailleurs, lire ces didascalies au pupitre est aussi un moyen de mettre en valeur le travail de lecture effectué par les élèves. Cela donnera aussi de la richesse au spectacle, puisqu’on jouera sur plusieurs tableaux : passer d’un état assez neutre en bord de scène, à de la lecture, et au jeu. On peut même imaginer un va-et-vient de la scène au pupitre : certaines didascalies pouvant être lues pendant une scène, pour décrire ce que les personnages font voir pour les guider.
Il n’est pas absolument nécessaire de finir l’écriture du spectacle au tout début du travail sur la pièce. Au contraire, lors des séances de travail sur le jeu (voir partie 2)), des idées peuvent naître en improvisation, en travaillant les personnages, chez l’enseignant·e comme les élèves. Il est toutefois important que l’enseignant·e prenne le temps d’y réfléchir en amont afin de mener le projet dans une direction qui lui est claire.