La pièce de Sandrine Roche se caractérise également par un important travail choral : la distribution inclut un chœur qui prend la parole à plusieurs reprises au cours du texte, et les deux enfants portent ensemble le récit qu’iels racontent. Ce type de parole est singulière et mérite qu’on s’y arrête : on ne parle pas de la même manière seul·e ou en groupe.
Reprenons pour commencer les personnages de Zelda et Jozef, et plus particulièrement leurs répliques de la scène 2 de la première partie (pp. 16-38) au cours de laquelle la narration du récit les occupe grandement.
La scène est divisée dans le texte en de nombreux courts fragments qui facilitent sa distribution parmi les élèves : on peut imaginer répartir les élèves en plusieurs duos, chacun travaillant sur un des fragments. Je propose ici de se concentrer sur les dix fragments suivants qui font la part belle au récit :
– Ceux de « ZELDA.- C’est drôlement beau […]” (p. 19) à « on la garde toujours dans les mains. » (p. 21)
– Ceux de « ZELDA.- On écoute la radio” (p. 23) à « à cause de la fin du monde. » (p. 29)
– Ceux de « JOZEF.- La construction était terminée” (p. 33) à « Le fonctionnaire disparu. » (p. 37)
Selon le nombre d’élèves en classe, on peut imaginer faire lire tous ces extraits dans l’ordre de la pièce pour produire une longue lecture collective en relais. Il est aussi possible de constituer des groupes de plusieurs duos (de 6, 8 voire 10 élèves), ces derniers se voyant attribuer un extrait. Chacun des groupes imagine alors une forme permettant la lecture à tour de rôle par ces duos. L’enjeu est alors de constituer un ensemble cohérent entre les extraits qui s’articulent autour d’un fil rouge, et dont le déroulé fait sens avec le cours du texte.
Pour préparer cela, les élèves peuvent s’appuyer sur la notion de relais, essentielle dans ces extraits. Tout d’abord, d’un point de vue de la langue, on remarque une ponctuation particulière : les répliques sont écrites en vers blancs. Ceux-ci comportent extrêmement peu de signes de ponctuation, une phrase pouvant faire plusieurs aller-retours entre les personnages. Il arrive donc qu’une prise de parole soit la continuité de la réplique précédente. Il est important de faire entendre cela : c’est ce qui donne le sentiment de continuité du récit.
Exercice 1 : Les élèves peuvent donc rechercher – en pratiquant – les différents outils qui font exister cette continuité. Cela demande une certaine qualité d’écoute pour se glisser dans le rythme, le timbre, le ton, la scansion de la personne juste avant nous, et pour laisser la place, en ne refermant pas trop ses fins de phrases, à la personne qui nous suit.
Exercice 2 : Enfin, la question du relais se pose aussi entre les extraits (et donc d’un duo à l’autre) pour bien faire entendre qu’iels composent tous la même histoire : les groupes doivent alors construire une lecture ensemble en réfléchissant à des moyens théâtraux (même place dans l’espace, enchaînement rythmé des extraits, même manière de se passer la parole au sein de chaque extrait, etc.) pour passer d’un groupe à l’autre. Il peut être intéressant que ces éléments de relais soient transformés au cours de la lecture, pour mieux témoigner de l’évolution de la situation et des personnages au sein de celle-ci : Zelda et Jozef, tout en gardant la même place l’un·e par rapport à l’autre, peuvent se rapprocher d’un pas à chaque extrait ; le rythme peut s’accélérer ou ralentir ; une même intonation peut s’accentuer au fur et à mesure ; etc.