éditions Théâtrales Jeunesse

Si le texte théâtral jeunesse est rarement épique dans son ensemble (on peut relever des exemples inverses comme Le Manuscrit des chiens de Jon Fosse ou Les Trois Jours de la queue du dragon de Jacques Rebotier), il joue souvent avec les procédés de l’épique, c’est-à-dire du récit. Aujourd’hui, la différence brechtienne dramatique / épique ne tient plus pour ce qui est de la réaction du lecteur/spectateur, tant les mélanges épiques/dramatiques sont devenus la loi dans la plupart des mises en scène et des écritures. La distance / distanciation est aujourd’hui créée par l’hybridité dramatique/épique. Épique pur ou dramatique pur n’existent plus. De plus on assiste aujourd’hui à un retour du narratif donc de l’épique mais pas dans les formes linéaires du modèle dramatique que critiquait Brecht. Michel Vinaver propose une distinction assez éclairante entre théâtre paysage et théâtre machine : quand l’avancement de l’action se fait par enchaînement de cause et d’effet, on a affaire à une pièce-machine ; quand on a une juxtaposition d’éléments discontinus, à caractère contingent (qui aurait pu ne pas avoir lieu), on a affaire à une pièce-paysage. Dans certaines pièces les deux coexistent.

On pourra aussi faire appel, comme pour la notion de « registres » en lycée, à la réaction des lecteurs/spectateurs pour faire la différence entre participation active à la fiction, par le fait de la vivre, et participation active par le fait de se mettre à distance : cela ne tient pas la route pédagogiquement.

Le mélange épique / dramatique (autrement appelé épicisation) est très présent en tout ou partie dans le théâtre jeunesse, qu’il passe par un ou des narrateurs ou conteurs (Petit Pierre de Suzanne Lebeau. Le Petit Chaperon rouge de Joël Pommerat) ou par un ou des personnages (Le Pont de pierre et la peau d’images de Daniel Danis) ou que, plus subtilement, l’auteur mêle récit et dialogue dans le présent de l’action et parfois dans une même réplique (Le Bruit des os qui craquent de Suzanne Lebeau). Cette forme de théâtre n’empêche pas le jeu, elle le sollicite même davantage en demandant à l’acteur une plus grande imagination, ce qui peut être une émulation au sein d’une classe.

Le théâtre fragmentaire est composé d’éléments différents qui ne constituent pas une fiction linéaire, et s’apparente à un montage (Comme des flèches vivantes de Françoise du Chaxel). Il sollicite l’imaginaire scénique du groupe.

Le théâtre contemporain jeunesse est très souvent un théâtre hybride qui joue avec toutes ces formes. Les enfants et les jeunes habitués aux clips, aux images superposées… sont sans doute plus aptes à les accepter et suivant l’âge, les décrypter.