Tout le monde a des idées. La philosophie commence quand on les examine, quand on regarde comment elles sont faites. Philosopher serait comme défaire les plis d’une boule de papier froissé. (qui pourra d’ailleurs devenir un outil pour un atelier de philosophie). L’atelier de philosophie est avant tout un temps d’interrogation et de recherche communes sur des questions existentielles (la vie, la mort, la justice, le beau, l’amitié, l’amour…) qui nous animent tous. Pour l’enfant, ce sera l’occasion de prendre conscience qu’il est capable de réfléchir à plusieurs et de penser par lui-même. Cet espace de dialogue est aussi une occasion d’établir un lien entre pensées et sensations.
Ci-dessous, est proposé un protocole (inspiré de différentes pratiques) à adapter selon le groupe.
Faire circuler la parole
Le bâton de parole peut être utilisé pendant l’atelier. Celui qui prend le bâton a quelque chose à dire et demande l’écoute, l’attention et le respect de tous. Il ne sera pas interrompu. Le bâton en main, il n’est plus question de parler sur l’autre mais au contraire de revenir à soi et d’exprimer une idée, un ressenti, un fait, un sentiment, une croyance… Le bâton de parole nous semble important pour développer une capacité d’écoute véritable et pour inciter chacun à construire sa réflexion. Le bâton de parole est un symbole fort qui responsabilise la prise de parole, une parole qui pourra alors résonner plus sensiblement.
La place et le rôle de l’adulte pendant l’atelier
L’adulte est le guide de l’atelier. Placé à la même hauteur que les enfants dans le cercle. Il est en état de réflexion et d’écoute de l’autre. Il veille sans cesse à ce que les enfants définissent les mots dont ils parlent, donnent des exemples et des contre-exemples, réfléchissent aux conséquences et implications de ce qu’ils disent. Il peut aider l’enfant à reformuler son propos et celui d’autrui pour s’assurer qu’ils soient bien compris. Il identifie les idées qui se rejoignent ou se distinguent pour mettre en lumière les associations et les confrontations. Le but ne sera jamais de convaincre autrui, d’essayer de le comprendre ou d’arriver à des réponses toutes faites et identiques pour chacun. Il s’agira plutôt de concevoir ce moment comme un horizon vers lequel tendre et pas un résultat à obtenir. L’important reste la réflexion que chacun mène et comment elle se nourrit de celle des autres pour se développer. Le guide avance avec le groupe dans les interrogations à la découverte des questionnements et des réponses de chacun. Il essaie de conserver deux minutes à la fin de la séance pour faire un bilan des idées et des nouvelles questions qui sont apparues pour retracer le cheminement des pensées communes. La synthèse pourra être dévoilée aux élèves dans un temps ultérieur à celui de l’atelier ou pourra être écrite sur un carnet collectif.
La place de l’adulte n’est jamais facile à trouver, elle s’apprend en pratiquant. Enregistrer ou filmer les discussions permet de prendre du recul par rapport à cette position et de l’affiner. Il convient de :
– respecter une déontologie
– ne pas donner son avis d’adulte, essayer de s’éloigner au maximum de ses perceptions d’adulte pour laisser la place à la réflexion de l’enfant en veillant tout de même à remettre en question certains propos si nécessaire
– ne pas entrer dans des déballages ou des considérations trop intimesAttention au relativisme (à chacun sa vérité) et à contrario au dogmatisme (une seule thèse à laquelle on devrait se soumettre)
– ne pas brusquer l’enfant dans le cheminement de sa pensée. Accepter les silences, les lenteurs dans l’élaboration de la pensée.
Démarrer l’atelier de philosophie
Il est important de définir le terme de philosophie avec les enfants avant de démarrer.
Voici un exemple de définition (à adapter selon l’âge des enfants) :
Pratiquer la philosophie, c’est s’interroger sur le monde qui nous entoure, sur la vérité, la vie, la mort, la relations aux autres hommes, la société... Faire de la philosophie c’est se poser des questions sur tout ce que nous faisons et pensons, sur tout ce qui relève de l’expérience humaine.
Le guide peut aussi s’appuyer sur l’expression « grande question » pour définir la philosophie. Une « grande question » est une question à laquelle nous n’avons jamais une réponse définitive, à laquelle chacun pourra avoir sa réponse en fonction de son expérience, de ses croyances, de sa manière d’être dans le monde...
Le guide et les enfants peuvent chercher ensemble « quelques grandes questions ».
L’atelier de philosophie pourra démarrer à partir d’une lecture d’extraits de la pièce de théâtre. Le carnet contient de nombreux extraits sur les thématiques du jardin secret, de la honte, de la normalité… À partir de cette lecture, le guide peut procéder à une collecte de questions au début de l’atelier pour mettre les enfants en état de questionnement comme tout philosophe !
Pour cela, il peut être intéressant de créer des binômes d’enfants qui réfléchissent ensemble à une grande question sur la thématique choisie.
Quand chaque binôme a formulé sa question, il peut l’écrire sur un bout de papier et la donner au guide de l’atelier qui la déposera au sol au milieu du cercle ou simplement aller le dire au guide qui l’inscrira sur un tableau. L’adulte veille à ce moment là à la pertinence des questions qui lui sont rapportées pour qu’une discussion puisse naître à partir de celles-ci. Les questions doivent être des questions ouvertes qui peuvent amener plein de réponses différentes et de nouvelles questions. Ensuite, nous pouvons procéder à un vote, un tirage au sort ou un choix du guide pour sélectionner la question débattue lors de l’atelier.
Quelques règles à suivre pour pouvoir échanger et penser tous ensemble :
Avant de commencer, il est primordial d’expliquer l’utilité et le mode d’utilisation du bâton de parole (écoute, attention sur celui qui parle, concentration…)
Ensuite, il est important de donner quelques règles à suivre aux enfants pour que la discussion soit possible :
L’atelier de philosophie peut s’apparenter, comme le spectacle ou la lecture, à la notion de voyage dans la pensée. Nous partons tous ensemble sur un chemin que nous allons tracer, regarder se modifier ensemble. Il est important également d’accepter qu’une discussion soit pauvre pour nous adultes, elle ne l’est pas forcément pour les enfants. Quoi qu’il se passe, il se passe quelque chose. Des pensées circulent. Des réflexions s’amorcent.