Ouvrir le livre comme un cadeau, comme une découverte. L’enseignant pourra jouer de ses talents de comédien pour donner envie à tous les élèves, même ceux à qui l’écrit fait peur. Tous les élèves pourront répondre aux questions suivantes : le texte vous semble-t-il aéré ? Combien de typographies peut-on trouver ? Les dialogues vous semblent-ils longs, courts ? (ici introduction possible aux notions de didascalies, dialogue, monologue).
Lecture individuelle de la séquence 7
Commencer par la fin c’est ouvrir un espace de liberté avec la lecture souvent brimée par les présupposés de l’attente institutionnelle. Ce texte contemporain aux frontières du réel et du fantastique le permet.
Il est très probable que les enfants vous diront qu’ils n’ont rien compris. C’est tant mieux. Se laisser porter par les sensations passera peut-être par l’arrêt momentané du mental qui a besoin de tout expliquer.
Jouer au surréalisme (pour aller plus loin cf. Plan de séquence pour le collège)
Que leur reste-t-il de cette lecture ? On pourra noter quelques mots au tableau, quelques sensations et faire une grande liste d’associations d’idées. Partir de cette matière d’interprétation et d’évocation libre pour donner l’envie de lire le texte.
Relire la séquence 7
Faire une trace écrite commune avec la méthode des 5 "W" (Who ? Where ? When ? What ? Why ?) Qui ? Où ? Quand ? Quoi ? Pourquoi ?
Il serait intéressant d’offrir cette première lecture par le maître les yeux fermés ou mieux encore bandés. Les enfants pourront mieux se plonger dans l’univers des sensations.
Cette proposition ne désavouerait pas l’auteur Dominique Paquet qui aime proposer des lectures (cf. italiennes) publiques de ses textes sans autre artifice que la voix, mettant ainsi en valeur la force des mots. On pourra faire comprendre le dialogue des deux personnages par des changements de voix ou de postures et les didascalies pourront être chuchotées.
Laisser les élèves s’exprimer sur leur ressenti (ou bien les faire dessiner. C’est une différenciation possible pour les élèves dyslexiques). Quelles sensations les ont marqué ? (auditives, tactiles, visuelles ?)
Noter sur le tableau des cinq sens les mots utilisés par les protagonistes pour décrire leur perception du monde à partir de la bulle.
En reprenant le texte, faire expliciter aux élèves le registre de langue qui nous permet de comprendre la familiarité des personnages : tutoiement, vocabulaire, « il s’est enfui en douce » p. 9, exclamation sans formule de politesse « Pas un œuf ! J’ai dit comme un œuf » ! » p. 10.
Réaliser une affiche qui pourra être complétée par les élèves tout au long du travail sur le vocabulaire des sens (tableau à double entrées par exemple avec les cinq sens et les classes de mots : verbes, noms, adjectifs et éventuellement une colonne « néologismes »)
Aborder la question de la peur dans la relation à l’Autre : Ézir a peur de ne pas aimer ses nouveaux voisins de nid, il a peur d’être abandonné, oublié.
On s’assurera que les élèves aient compris :
Quelques clés de lecture :
◊La présence du docteur donne une tonalité réaliste, moins métaphorique, à la bulle. On pense aux enfants-bulles, immunodéficients, mis en quarantaine à l’hôpital et qui n’ont pour seuls contacts physiques avec l’extérieur que les gants des praticiens ou de leurs parents.
Fragilisés par une déficience immunitaire, l’air même devient un danger potentiel. On pourra ainsi expliquer la réplique de Tyrse « l’air, le vrai, entrera en nous et nous exploserons comme le cristal. Notre petite vie s’en ira en mille morceaux » (p. 13)
L’auteur Dominique Paquet sait que son inspiration vient d’un souvenir d’enfance personnel dans l’univers médical. Toutefois, avec cette pièce qui nous plonge dans une littérature poétique et théâtrale où il est question d’allégorie et de représentation, il serait sans doute habile de mettre à distance, dans un premier temps cette image (cf. plan de travail pluridisciplinaire en instruction civique autour de la norme et du handicap).
Ce jeu a vraiment existé contrairement à ce que dit Ézir dans la dernière réplique de la pièce. Dominique Paquet relate le souvenir d’un jeu dans lequel, par une ritournelle « Qui veut jouer à la charrette brûlée », des enfants s’aggloméraient les uns aux autres par cet appel répétitif, se tenant par les bras, côte à côte. Le jeu était donc simplement de se réunir, d’être ensemble, de se toucher.
Ce qui importe au fond ce n’est pas de savoir si le jeu a existé ou non mais de comprendre le désir profond de la rencontre de l’Autre. Cet appel du monde extérieur symbolisé par le jeu de la charrette brûlée revient tout au long de la pièce et lui donne son point final. D’ailleurs, Patrick Simon, metteur en scène de la pièce, avait choisi de ponctuer la pièce par cette ritournelle chantée, orchestrée chaque fois de manière différente mais redondante, comme un refrain. C’est une clé de compréhension certainement importante à donner aux élèves dès le départ.
Lecture individuelle.
Travail en deux groupes. L’un pourra travailler sur les actions et l’autre sur les sens et l’affect. Ne pas hésiter à proposer que le travail soit fait par groupe de 2 ou plus car le débat argumentatif peut-être ici intéressant : comment classer la phrase « je touche des yeux » (p. 17), par exemple.
À la mise en commun on tachera d’expliciter les visions fantasmées des enfants et leurs peurs :
Travail continu sur les registres de langue :
P. 25 à 26 : observer les signes / lecture en diagonale.
On pourra axer cette séance sur une observation réfléchie de la langue à dominante grammaticale.
Cycle 2 : on pourra proposer une lecture en diagonale de ces deux pages afin d’affiner la discrimination visuelle des plus petits (Quels signes ? Quelle ponctuation ?)
Cycle 3 : analyse grammaticale des types de phrases (affirmative, négative, exclamative, interrogative)
Demander aux élèves quelle impression se dégage de ce foisonnement de types de phrases : du calme, de l’agitation ? Est-ce une scène importante dans la pièce ?
Nous remarquerons la voix didascalique minimaliste chez Dominique Paquet « Après-midi » et anti naturaliste « Entrée de la bouche du médecin et des yeux des parents » comme si l’auteur écrivait depuis l’univers des enfants bulles.
Les articles
Analyse / compréhension de l’article indéfini à partir de la réplique d’Ézir « Toute la nuit, DES parents sont entrés par effraction dans mes rêves ».
Vocabulaire et registre de langue
Extrait très riche en images et métaphores, nous pourrons nous appuyer sur la liste de sensations corporelles énumérées par Ézir. Il pourra être intéressant d’associer le son au geste dans une mise en voix (exemple ci-après)
P. 26 à 29 : lecture à haute voix du dialogue croisé.
Pour favoriser la compréhension on pourra dans un premier temps, constituer deux groupes de travail en autonomie sur la préparation de la lecture à haute voix : l’un pour le dialogue : Tyrse / Madame Tyrse et l’autre pour Ézir / Monsieur Ézir.
Dialogue Tyrse / Madame Tyrse
On relèvera le décalage dès le début : « Comment te sens-tu » demande Madame Tyrse et son fils ne comprenant pas répond « Je ne me sens pas trop ».
Les paroles de Madame Tyrse sont affectueuses et très concrètes, ancrées dans le monde matériel. On apprend que Tyrse à un père et une sœur Teza, qu’il devrait sortir au printemps et que sa chambre est prête. Elle apporte des objets : livres, albums. Son discours assoit le réel. À l’opposé, les paroles de Tyrse sont poétiques et immatérielles, romantiques : ils parlent de ses sentiments par des métaphores de nature.
Ici le texte révèle l’énigme du titre : Son Parfum d’Avalanche c’est la mère, le souvenir de la mère. Perçu par les yeux comme il l’aurait touchée (« Regarde moi bien contre les yeux » dit-il p. 28), son souvenir est olfactif (parfum) et tactile (l’avalanche évoque un mouvement violent et une froideur).
Dialogue Ézir / Monsieur Ézir
La première réplique de Monsieur Ézir répond sans doute à l’injonction du médecin de parler lentement. Face à la vivacité d’Ézir cette intervention infantilisante semble inadaptée. Le doute persiste : est-ce la première fois qu’ils se voient ? (« UN papa ? » demande Ézir. Le père semble douter « depuis si longtemps, presque depuis toujours ». « Où vis-tu » demande Ézir.
Ici le dialogue est tout en sous-entendu. Monsieur Ézir reprend l’image d’avalanche d’Ézir sans toutefois l’expliquer. Il semble éluder la question (« euh… ») Il compare sa naissance à un coup de tonnerre, le décrit comme un individu handicapé puis finit par dire qu’il est heureux que sa sœur ne soit pas comme lui. La réaction d’Ézir est la fierté (crâneur indique Dominique Paquet). Il coupe court à la discussion et se tourne vers l’avenir en questionnant son père au sujet de la charrette brûlée, symbole de liberté.
Il sera intéressant de distinguer les caractères des deux héros : l’un plutôt romantique et sentimental et l’autre plutôt tenace et actif.
La violence du discours du père d’Ézir pourra nous conduire à mener un débat sur la norme et le handicap (cf. plan de travail pluridisciplinaire)
Une tonalité de fraîcheur et d’humour se dégage de cette séquence, contrastant avec la gravité de la dernière. On pourra travailler les thèmes de la découverte de l’autre, la peur de l’inconnu mais aussi le fantasme autour de la naissance (omniprésence de la métaphore de l’eau avec le personnage d’Azou et qui rappelle la vie intra-utérine), les relations filles / garçons.
Enrichir le tableau des 5 sens.
Cette situation n’est pas sans rappeler La dispute de Marivaux dont l’ouverture met en scène de jeunes gens qui furent sciemment isolés du monde extérieur et qui rencontrent d’autres jeunes gens, du même sexe et du sexe opposé pour la première fois. Leurs noms ? Azor et Églé. Avec des collégiens, on pourra enrichir la séquence par une lecture de cette scène.
Cette séquence qui met en scène l’intimité se prêterait bien à une lecture individuelle au préalable.
Au sens de la vue « Tu es jolie », succède tout de suite le sens du toucher « Toute transparente. On voit encore les vagues au travers de ta peau ». La séquence sera entremêlée de ces deux sens :
« Vous avez les yeux fous » dit Azou p. 43, « Qu’est ce que tu vois ? » etc. C’est la vue qui ouvre à la découverte. Ézir interrompra d’ailleurs l’amour d’Azou et de Tyrse naissant par le toucher, la peau, par un « Regardez ».
On pourra demander aux élèves de relever les termes et expressions relatifs à ces deux sens, puis on pourra s’appuyer sur les néologismes autour du toucher (« ça doucine », « ça grouzille », « ça chuchine », « les frissonures ») pour amorcer un travail d’écriture de mots inventés (travail des préfixes et suffixes en grammaire) à partir des mots glanés sur le tableau des cinq sens.
D’autres pistes :
La nuit
Première scène nocturne après une alternance Matin et Après-midi : travail possible sur le décor, la lumière, l’ambiance.
Les oiseaux
Dominique Paquet nous invite à observer le tableau Le domaine d’Arnheim de Magritte qui correspond tout à fait au sujet de sa pièce. Le tableau, au crépuscule, met en scène un nid, posé sur un muret, dans lequel on peut voir 3 œufs. Au loin la montagne prend la forme d’un aigle.
Dans l’avant-dernière didascalie les enfants « rient, prêts à s’envoler ».
Vêtement : seconde peau et symbole de l’envol ?
Dans le monde observé par Ézir les humains sont emmitouflés et on ne voit pas leurs visages (p. 44). Tandis que dans la peau des nuages, Ézir voit des visages d’hommes, p. 47. Un homme debout sur une fenêtre « des chemises attachées au bras comme des ailes » p. 44. Des enfants prêts à s’envoler quand le vent fait flotter leurs vêtements s’exclament avec un lexique relatif au tissu : « effiloche », « chiffonne », « emmaillote » p. 48.
On pourra profiter du suspens de la didascalie finale pour offrir une lecture magistrale de la séquence 6.
On pourra travailler sur la transposition du vocabulaire par la définition des verbes « je l’éperonne, je le catapulte (…) je le sauce, je l’essore » etc.
L’espoir est apporté par Azou « Nous guérirons ensemble » .
C’est Ézir qui nous donne la clé en affirmant par sa réplique finale que le jeu de la charrette n’existe pas. Qu’est-ce qui existe ou n’existe pas ? Quel monde est le « vrai » ? Ézir ne dit-il pas, en réponse à « Tout le monde est là ? » « Oui le faux père, la fausse mère ». Il semble aller vers un faux monde.
On pourra organiser un temps de débat à partir de cette citation de Magritte : « Faire de la peinture un moyen pour approfondir la connaissance du monde, mais une connaissance qui soit inséparable de son mystère ».
La peur de l’inconnu comme un espace pour l’imagination.