Nous proposons de commencer par une lecture offerte du Souvenir 1 jusqu’à « baptiser » ; dans des conditions de relaxation / musique péruvienne / les yeux fermés.
En guise de mise en appétit, nous proposons de donner aux enfants la table des matières (écrite au tableau, sur une affiche, par rétro projection, sur tableau numérique…).
En groupe, les élèves seront invités à émettre des hypothèses sur l’histoire en argumentant, à partir des mots du texte.Individuellement, on amènera chacun à relever un mot essentiel dans cette table des matières et à dire quel est le chapitre qu’il a le plus envie de lire ? Pourquoi ? De quel type d’écrit peut-il s’agir ? Argumenter.
Proposer une « tempête de cerveaux » par association libre d’idées à partir du mot, « souvenir ».
Recherche par petit groupe d’élèves et présentation par chaque groupe d’une affiche en forme de constellation.
En groupe-classe, proposer ensuite de rassembler certains mots ou thèmes communs pour dégager le concept, définir le mot.
Exemples de ce qui pourrait surgir :
Puis, chercher dans le dictionnaire le sens, la définition du mot « souvenir » et du verbe « se souvenir. »
Offrir le texte. Nous utilisons sciemment le mot « offrir », conscientes que l’objet-livre, parfois banalisé et « malmené », dans les écoles, pourrait être présenté de manière un peu « solennelle ».
Présenter le texte : il s’agit d’une pièce de théâtre mais il y a en effet dans la table des matières plusieurs critères qui peuvent faire penser au roman (épicisation).
Ce texte théâtral n’est ni organisé en scènes ou en actes, ni en chapitres comme dans un roman mais en souvenirs.
Les souvenirs sont numérotés de 1 à 20 et suivent l’ordre chronologique de la vie du héros.
Approche sensorielle du livre :
L’illustration de toutes les couvertures de la collection jeunesse des éditions Théâtrales est une composition/maquette de ballons de baudruche.
Il serait intéressant de demander aux élèves de faire une recherche sur cette collection dans leur bibliothèque municipale, de quartier, la BCD, bibliothèque de classe. Ce sera l’occasion de clarifier les notions d’auteur/éditeur/collection.
On pourra ainsi comparer plusieurs couvertures afin de mieux comprendre les choix du maquettiste dans cette composition « abstraite ». (Voir la valise « théâtre »dans plan pluridisciplinaire).
Il y a un jeu d’ombre. On voit par transparence l’embout du ballon bleu comme s’il était dans le ballon orangé foncé contenu par le ballon orange clair.
Cette forme semble évoquer un embout « embryon » ou un cordon ombilical. Métaphore de la naissance ou de la graine, du fruit.
On peut imaginer que le ballon orange prend son envol par rapport au ballon bleu… comme Salvador qui se détache de sa mère et grandit.
Nous proposons de plonger au cœur du texte avec le Souvenir 1 pour s’imprégner de la beauté de l’histoire et d’étudier, ensuite, le sens des didascalies (récit/voix-off).
Lecture à haute voix du Souvenir 1 en entier.
Titre énigmatique : « Le jour de ma naissance les cloches n’ont pas sonné. »
Se souvient-on du jour de sa naissance ? Ce souvenir n’est-il pas un souvenir d’autres membres de la famille rapporté aux oreilles de Salvador ? Dans ce cas, quelle est la différence entre le souvenir de son propre vécu et les légendes familiales, la manière que l’on a de romancer ses souvenirs ?
Pourquoi les cloches n’ont-elles pas sonné ?
C’est une description poétique : on relève de nombreuses images de la nature et du sentiment : « les nuages qui attristent le cœur des gens », « Être dans les montagnes c’est être juste sous le soleil et le ciel » ; une personnification de la nature : « La montagne est habile à geler jusqu’à l’âme »
C’est aussi un récit brut où l’on sent la dureté de la vie : « il ne pouvait pas être le père d’un bébé aussi laid... »
On peut noter l’autodérision : « j’étais à peine plus gros qu’une petite patate » ; et un ton humoristique : « on lui a dit qu’elle avait accouché d’un cochon d’Inde ».
Dès sa naissance, on comprend que l’histoire de Salvador sera celle d’un destin particulier. Que son histoire sera différente des autres, de celles de ses frères et sœurs.
Sa naissance fut perçue comme « un grand malheur », une punition : « elle avait dû faire une faute ». Le malheur avait frappé la famille.
Salvador est né en avance, fragile, faible : ma mère « avait toutes les raisons de croire que je ne ferais jamais rien de bien dans la vie ».
Cela peut conduire à une réflexion sur la fatalité, l’idée d’un destin tracé au départ. Les moments difficiles renforcent-ils ?
Réflexion également sur la normalité (petit, poilu). Ce qui est inhabituel, pas ordinaire, extraordinaire est-il grave ? Pourquoi l’inconnu fait-il peur ?
On comprend dès les premières pages le caractère altruiste de Salvador. Il a la volonté d’aider les autres, du meilleur de son être, comme si tout était possible en dépit d’une naissance hors du commun.
Si les élèves ont déjà étudié un conte, il serait intéressant de mettre avec eux en évidence que l’histoire de Salvador contient des ingrédients qui peuvent se référer à une structure de contes. (cf bibliographie La Psychanalyse des contes de fée, Bettelheim)
D’abord une menace est dirigée contre l’existence physique du héros, ou contre son existence morale. Puis le héros enfant ou adolescent est soumis à des épreuves, qui sont les véritables nœuds de l’intrigue : notamment l’épreuve de la séparation.
La plupart des contes de fées commencent en effet par la séparation, qui revêt plusieurs facettes se combinant entre elles.
Elle est souvent représentée par la mort d’un parent : la mère de Cendrillon, le père de Blanche-Neige ou par le départ de l’enfant, soit parce que celui-ci est abandonné par ses parents ou par un tiers (Le Petit Poucet, Hänsel et Gretel, Blanche-Neige), soit parce qu’il fuit une situation impossible (Peau-d’Âne).
On note que dans l’histoire de Salvador c’est celle du père : rejet à la naissance (peur de l’abandon) puis mort du père, qui le contraint à devenir l’homme de la famille à 7 ans (Souvenir 16 p 59).
Quelle que soit sa nature, la séparation équivaut, selon Bettelheim, à la « nécessité de devenir soi-même ».
Nous parlerons aussi de la peur, la mort et la recherche de l’amour.
En filigrane sont ainsi révélés les deux moteurs de l’action des héros : la peur de la mort et la recherche de l’amour.
Le bonheur et l’amour sont une récompense.
La plupart des contes finissent toujours par récompenser le héros. Les enfants abandonnés retrouvent la maison familiale où ils rentrent chargés des richesses qui leur éviteront à jamais des mésaventures. C’est grâce à la générosité de Bianca Albacarra que Salvador pourra poursuivre ses études.
Il est possible de montrer que les épreuves sont différenciées selon le sexe du héros.
Attendues, les épreuves le sont aussi en fonction du sexe du personnage principal.
Le voyage, comme pour Salvador, est une marque de l’apprentissage de la virilité. De nombreux contes présentent un jeune garçon qui va parcourir le monde, à la conquête d’une femme, du trône, ou tout simplement pour apprendre la vie.
Dès ce premier souvenir, on note l’importance de la mère de Salvador, qui se confirmera tout au long de la pièce.
Avec une croyance alliée à une ténacité et une volonté de fer, la mère livre une bataille contre la montagne et l’hiver pour sauver son fils. Elle lutte contre le froid, le masse, prend soin de lui.
Cette mère qui affronte, qui se bat contre la montagne. La montagne peut « geler l’âme » mais sa mère est plus forte. Elle a juré qu’aucun de ses fils ne mourrait avant elle. La mère est vue comme une adulte expérimentée et réaliste « qui devait savoir que les choses ne se font pas aussi facilement ». Salvador nous parle d’un savoir acquis par l’âge et l’expérience.
Les considérations du bien et du mal fondent les religions et les valeurs qui s’y rattachent. Il est intéressant de connaître les fondements des religions pour ne pas être dans l’ignorance ou l’incompréhension et pour plus de tolérance.
La croyance : « elle avait dû faire une faute très grave pour qu’un si grand malheur arrive ». Notion de faute qui ramène au péché, à la punition. Le bien/récompense, le mal/punition. D’ailleurs le curé a refusé de sonner les cloches… Idée qu’on mérite ce qui nous arrive (?).
Ainsi on comprendra mieux que le père ait eu peur de Salvador. Pour lui ce fut comme une sanction divine. Il n’est pas un mauvais père. Il réagit en fonction de sa croyance.
On pourra aussi développer les idées suivantes :
Sur ce dernier point, il serait intéressant de développer l’idée qu’il y a des hauts et des bas dans la vie de Salvador, comme dans tous les chemins de vie. On pourra faire un travail possible sur des expressions de la langue française qui illustrent ce caractère cyclique en comparaison à la nature :
Pour finir, nous proposons d’offrir la lecture à haute voix d’un conte traditionnel chinois (cf annexe).
Le sens des didascalies : expliquer Récit / voix off
11 personnages ou 12 car il y a deux Salvador (l’enfant et l’adulte)
La compréhension du choix par S. Lebeau d’un personnage action et d’un personnage récit est primordiale. Cf Épicisation.
Cette liste de personnages nous permet de comprendre qu’il s’agit d’un texte théâtral.
Cela est confirmé par le paragraphe en bas de page : « La pièce a été créée… » à propos de la première représentation de la pièce, par le Théâtre du Carrousel.