L’objectif de l’étude de la pièce en première partie n’est pas de produire un argumentaire théorique déconnecté de la scène. Au contraire, il s’agit d’une analyse dramaturgique qui a pour but de mettre en évidence la structure de la pièce et certains de ses mécanismes qui seront utiles lors du passage au plateau. Il est important d’avoir conscience de ces leviers dramaturgiques car ce sont eux qui donnent du jeu : c’est parce que l’on comprend à quel point un robot humanoïde peut être troublant que l’on peut mettre en scène ce trouble.
Avant de passer à la mise en scène à proprement parler, la lecture à haute voix est une étape essentielle qui permet de mieux appréhender ces leviers, ou d’en découvrir de nouveaux. Puisqu’elle met particulièrement en avant le texte, la lecture peut être un terrain judicieux pour explorer la question de la nature de la parole et de l’adresse des répliques, soulevée plus haut.
Pour ce faire, les scènes 6 et 7 (pp. 15-19) semblent appropriées : dans la première, les personnages parlent dans un « monologue intérieur » (p. 15), et la seconde alterne entre des commentaires Facebook et du dialogue.
Exercice :
Il est possible de commencer à lancer les élèves dans une première lecture. Pour la scène 6, on peut compter 5 élèves (un·e qui lit les didascalies, plus un·e par personnage), et la scène 7 peut être lue à 3 ou 4 (un·e élève pour les didascalies, un·e pour Jérémy, et un·e voire deux pour Garance avec un passage de relais après le départ de Jérémy).
– Suite à cette première lecture, on peut interroger les élèves sur ce qu’il se passe dans ces deux scènes : qui parle ? À qui ? Pourquoi ? Est-ce que les personnes à qui l’on parle sont présentes ? Est-ce que l’on parle de la même manière dans les deux scènes, est-ce que toutes les répliques sont sur le même niveau ? Pendant cette discussion, les élèves peuvent donner, par exemple, des références tirées de leur vie, de films, de spectacles, etc. qui leur rappellent cet extrait. La scène de recueillement, par exemple, est assez courante.
Il est important que les élèves s’expriment à ce sujet afin qu’iels aient toujours en tête les enjeux du texte qui vont mener à une deuxième lecture.
Au théâtre, la lecture peut être un genre de spectacle à part entière, et donc nécessiter quelques éléments rudimentaires de mise en scène. Même si les acteur·rices n’interprètent pas leur partition à proprement parler, une gestion claire de l’espace peut permettre de mieux entendre le texte. À la suite de cette discussion, on peut déterminer avec les élèves quelques points importants sur la structure des scènes qui pourront être utilisés pour cette deuxième lecture en espace. Les élèves peuvent proposer ainsi une disposition de l’espace qui leur semble judicieuse.
Quelques pistes de mise en espace :
– Pour la scène 6, la position de recueillement debout face à un cercueil est assez éloquente et induit tout de suite une atmosphère particulière. Sans chercher nécessairement à faire entrer un cercueil en salle de classe, ce qui est complexe d’un point de vue logistique, on peut alors réfléchir à un moyen de le représenter, ce qui active l’imaginaire. Quelques tables, par exemple, peuvent faire parfaitement l’affaire.
– La scène 7 est caractérisée par une alternance entre la lecture de textes sur un écran et des répliques en dialogue direct. Il parait important de figurer ce changement d’adresse. On peut imaginer Garance assise à une table qui alterne entre une lecture pour elle nez dans le texte, et une lecture en lien avec Jérémy, debout à ses côtés.
Cette deuxième lecture peut également faire l’objet d’une discussion avec la classe. Est-ce que l’on entend mieux le texte, la situation, les rapports entre les personnages, etc. ? Est-ce que l’on entend aussi les changements dans les adresses ? Peut-être entend-on plus clairement aussi, dans la scène 6, tout ce qui est de l’ordre du souvenir. On peut le noter. Tous ces éléments pourront être utiles par la suite quand il s’agira de mettre en jeu le texte. Ils sont riches en informations sur les rapports entre les personnages, les habitudes, leurs vêtements, les choses qui les marquent. Angie cite ici son grand-père : « Je suis une antiquité » (p. 15) qui lui a dit ceci dans la première scène (p. 8), et ce dans une formulation légèrement différente. Angie ne fait donc pas spécifiquement référence à cette première scène, mais à quelque chose que Jacques pouvait répéter régulièrement.
Discuter avec les élèves après cette lecture permet donc de mettre en lumière des éléments dont iels pourront se resservir dans la suite du travail.