éditions Théâtrales Jeunesse

Du temps que les arbres parlaient

de Yves Lebeau

Carnet artistique et pédagogique


Carnet mis à jour en 2017.

Carnet pédagogique rédigé par Annie Quenet, professeur de français retraitée
Recherches documentaires et entretiens : Alexandra Lazarescou.

Avertissement

Le texte (voir présentation ci-dessous) aborde la question délicate d’un enfant qui n’a plus envie de vivre. Pas de faux-semblant ici sur la vie, la force vitale et le mal de vivre parfois. Cependant Yves Lebeau, jamais ne prononce le mot « suicide », ni même celui de « mourir » comme volonté ; l’Enfant, sous sa plume, veut « partir plus sentir… », « fondre », « s’effacer ». L’auteur ne plonge pas le lecteur dans le réalisme d’un fait de société, il cherche la vérité humaine par le poétique : celui des mythes et des symboles. La solidité de la figure de l’Arbre qui oppose à l’enfant, la sensualité de la nature, sa force de vie, son enracinement ; la puissance poétique de son écriture, comme la renaissance finale de l’Enfant et la vie qui lui arrive à l’horizon, sous la forme d’une robe… Tout cela donne le visage d’une initiation positive. Sans parler de L’Arbre qui, sachant le poids de la vie, a aussi une tendre rouerie, et de L’Enfant, qui a le sens de la réplique et une clairvoyance à la Zazie. Mais deux ou trois courts passages pourront paraître délicats. Il serait dommage pourtant de priver les enfants de la lecture de ce texte d’une beauté et force indéniables, traversé par de grands courants d’air de poésie.

Ce carnet propose des modes de lecture et des approches, qui n’édulcorent en rien le texte mais prennent en compte cette crainte possible. Parmi lesquels la proposition principale : mener cette lecture uniquement en classe, le plus souvent à voix haute, celle des élèves ou de l’enseignant.

Présentation

L’Enfant déboule auprès de L’Arbre, un vieux chêne, aussi seul que lui sur la plaine, au milieu des blés. Et il faut entendre comme il l’interpelle ! Il y aurait donc urgence ? Une urgence peu commune : trouver auprès de L’Arbre, la manière de… « partir ». Buté, muré, L’Enfant a la tête dure. L’Arbre, vieux de ses 217 années, lui oppose toute la force de son tronc : il s’y cogne en vain. D’un lundi à un dimanche, les saisons défilent, la nuit succède au jour et le jour à la nuit, et L’Arbre triomphe de l’entêtement de L’Enfant. Il le met au défi de passer à l’acte, l’accueillant dans son tronc fendu par l’orage, l’enfermant pour une nouvelle gestation, avant qu’il ne naisse une deuxième fois, tout neuf, avec au cœur, le choix de vivre.

En classe de 6e, la lecture de Du temps où les arbres parlaient pourra s’inscrire dans une séquence consacrée aux « Textes fondateurs », notamment à la Genèse, la prolonger ou l’introduire. Le dossier plutôt conçu pour des CM2, 6e, 5e pourrait répondre aussi à une approche différente en 3e, 2de, (voir L’Arbre pour L’Enfant ? Un Sage)

L’auteur : Yves Lebeau

Né au pays de Barbe-Bleue.
Études de grammaire à l’université de Nantes.

Acteur
Il entre au Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris, en 1968.

Auteur dramatique
À partir de 1979, il écrit pour le théâtre. Comptine, en 1982 – mise en scène de Jean-Luc Boutté –, Homme avec femme arbre et enfant, en 1984 – mise en scène de Jacques Baillon – et Le Chant de la baleine abandonnée, en 2000 – mise en scène de Jacques Rosner – sont créées par les Comédiens-Français.

Prix
Grand Prix Paul-Gilson en 1981. Prix radio de la SACD en 1991.

Conseiller littéraire
À France Culture de 1996 à 1999.

Traducteur
Il traduit depuis 2002 l’œuvre de Juan Mayorga.

Le texte

« Je veux m’en aller
partir pour de bon
partir plus sentir
partir plus être vu
redevenir comme avant
avant quand j’étais pas
je veux m’effacer
comme à la gomme à crayon
me fondre
comme le sucre dans le café
plus être
je veux mourir quoi ! »

Ainsi se parle l’Enfant,
comptant ses pas sur le chemin.
Mais dire ces mots – à douze ans –,
les murmurer seulement,
en a-t-il le droit ?
À qui se confier ? Personne n’écoute.
Un arbre peut-être l’entendrait.
Ce chêne, seul sur la plaine
au milieu des blés ?
Lui, oui !
Et s’il répondait ?