Si le tableau III est situé sur un quai de gare (unité de lieu, de temps, de situation), le tableau II fait se succéder comme en accéléré différents espaces/temps (extérieur ou intérieur de la Mairie, seuil, extérieur, puis salle de restaurant)
Ce tableau est une excellente occasion d’aborder la question capitale dans l’étude des textes de théâtre de l’espace/temps de la fiction / espace/temps de la représentation.
On pourra lister les différentes situations du mariage accompagnées du lieu et du moment de la journée. La durée : au minimum sept heures ! On chronométrera alors le temps de lecture : même en tenant compte des temps de jeu qui s’ajouteraient sur scène, à l’évidence, il serait impossible de jouer cette scène de manière réaliste, de même qu’on ne pourrait figurer tous les lieux dans un décor. Ce sera donc aux acteurs de faire imaginer aux spectateurs une situation qu’ils ont connue, tout ça sur plateau nu, l’essentiel étant d’exprimer la joie, puis l’inquiétude, puis le refus de l’inquiétude : « Serre-moi fort / Et dansons ».
Sauf à jouer cette scène en accéléré comme dans les films muets (pourquoi pas à expérimenter mais garder cette mise en jeu, facteur de comique, ne s’accorderait guère à la tonalité d’ensemble et au contraste recherché avec le Tableau III) la recherche de mise en jeu obligera à trouver une image théâtrale en mouvement plutôt qu’un jeu réaliste.
Si le groupe ou les deux trois sous-groupes éventuels de recherche ne parviennent pas à exprimer la vie et la joie collective de cette scène, on pourra passer par le détour d’une improvisation : la sortie dans la cour quand la cloche des vacances a sonné ; le coup de sifflet final qui donne la victoire à une équipe sportive, etc.
Pourraient aider si nécessaire d’autres exercices préalables de marche dans l’espace avec travail du volume sonore, du murmuré au dit à une personne, au crié au hurlé seul ou ensemble.
Là l’espace/temps peut se superposer à celui de la représentation sauf qu’il serait maladroit de créer le décor d’une gare pour ce seul tableau alors que dans l’ensemble du texte, il n’y en aurait pas. Comme dans le II on préférera l’évocation par le seul jeu des acteurs, placements et déplacements, en tout cas mouvements.
L’essentiel sera de leur faire chercher tout ce qui accentuera pour les spectateurs, le contraste par comparaison possible. De là naîtra l’émotion ressentie à la lecture, qu’ils se disent, eux aussi « quelle connerie la guerre ! ».
Si l’on veut tout de même faire imaginer le quai de gare, comment faire ?
D’abord choisir le placement des soldats ; à défaut d’une bande étroite d’éclairage au sol, les élèves suggéreront certainement le bruitage d’un train. Dans ce cas, ils auront peut-être l’idée d’accentuer le contraste avec le tableau II en y introduisant une musique de bal (à peine commencée aussitôt interrompue par le bruitage du train).
Ils auront aussi à cœur, suite à la recherche préalable de mise en voix, de créer cet effet de gros plan sur Arsène et Coquelicot à la fin des deux scènes, tel qu’écrit par l’auteur.